signifie exactement cette domination, et comment les lois écono-
miques de la société capitaliste s'expriment à travers les rap--
ports des deux classss fondamentales de cette société.
Les lois économiques du capitalisme imposent la vente de
la force de travail « à sa valeur ». La force de travail étant, en:
(13. 6. MARX, Le Capital, t. XIV, p. 117.
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effet, dans la société capitaliste une marchandise, elle doit être
vendue à son coût. Mais quel est le coût de la force de tra-
vail ? C'est visiblement la valeur des produits que l'ouvrier
.consomme pour vivre et se reproduire. Mais la valeur de ces
produits est tout aussi évidemment la résultante de deux. fac-
teurs : de la valeur de chaque produit pris à part, et de la quan-
tité totale de produits que consomme l'ouvrier. La valeur de
la force de travail dépensée pendant une journée peut être de
Too francs, si l'ouvrier se nourrit uniquement avec i kilo de
pain, et le kilo de pain coûte 100 francs; elle peut être égale-
ment de 100 francs, si l'ouvrier se nourrit avec deux kilos de
pain, mais chaque kilo coûte 50 francs; elle peut être de 200
francs, si l'ouvrier consamme deux kilos. de pain, le kilo coûtant
100 francs. L'analyse économique du capitalisme nous permet,
sous la forme de la loi de la valeur, de connaître la valeur de
chaque unité de produit entrant dans la sonsommation ouvrière
et l'évolution de cette valeur. Mais la loi de la valeur en elle-
même, sous sa forme immédiate, ne nous dit rien, et ne peut
rien nous dire, sur les facteurs qui déterminent la quantité plus
ou moins grande de produits que consomme la classe ouvrière,
ce qu'on appelle d'habitude le « standard de vie » de la classe
ouvrière. Il est pourtant clair que sans une définition exacte de
ces facteurs, l'application de la loi de la valeur à la vente de la
force de travail devient complètement problématique.
La question ne pouvait pas échapper à Marx; il lui a donné
trois réponses, qui, pour être différentes, ne sont nullement con-
tradictoires. Le niveau de vie de la classe ouvrière, dit-il, dans
le premier volume du Capital, est déterminée par des facteurs
historiques, moraux et sociaux (44). Il est déterminé, dit-il dans
Salaires, prix et profits, par le rapport des forces entre le prolé-
tariat et la bourgeoisie (45); il est, dit-il enfin dans le troisième
volume du Capital, déterminé par les besoins internes de l'accu-
mulation capitaliste et par la tendance inexorable de l'économie
capitaliste vers la réduction de la partie, payée de la journée
du travail au strict minimum, sous la pression de la baisse
du taux de profit et de la crise croissante du système capitaliste.
Entre ces trois facteurs il existe, d'une part, une liaison
logique, d'autre part, un ordre historique. Tous les trois sont
des facteurs qui agissent constamment et à la fois pendant toute
la période capitaliste et qui ne sont nullement extérieurs les uns
aux autres. Ainsi l'on peut ramener les « facteurs historiques,
moraux, ect... » aux résultats combinés de la lutte des classes
(44) Le Capital, t. I, p. 196.
(45) V. aussi Misère de la Philosophie, p. 208 et suiv.
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dans le passé et de l'action de la tendance intrinsèque du capi-
talisme vers une exploitation toujours plus grande du prolé-