production (2). Mais la situation, quant à l'essentiel, est la même
dans tous les domaines qu'il s'agisse de la famille, de l'éduca-
tion, de la poliuque, des rappports internationaux ou de la cul-
ture. Parioui, la struciure capitaliste consiste à organiser la vie
des hommes du denors, en l'absence des intéressés et à l'encon-
tre de leurs tenaances et de leurs intérêts. Ce n'est là qu'une autre
maniere ae aire que la société capitaliste est divisée entre une
mince couche de airigeants, qui ont pour fonction de décider de
la vie de tout le monde, et la grande majorité des hommes, réduits
à exécuter les décisions des airigeants et, de ce fait, à subir leur
propre vie comme quelque chose d'étranger à eux-mêmes.
Cere organisauon est proronaément irrationnelle et contra-
dictoire, et le renouvellement perpétuel de ses crises, sous une
forme ou une auire, est absolument inévitable. Il est proiondé-
ment irrationnel de préienare organiser les hommes, qu'il s'agisse
de proauction ou ae vie politique, comme s'ils étaient des objets,
en ignorant délibérément ce qu'eux-mêmes pensent et veulent
quant à leur propre organisation. Dans les faits, le capitalisme
est obligé de s'appuyer sur la faculté d'auto-organisation des
groupes humains, sur la créativité individuelle et collective des
proaucieurs, sans laquelle il ne pourrait pas subsister un jour.
Mais toute son organisation officielle à la fois ignore et essaie de
supprimer le plus possible ces facultés d'auto-organisation et de
creation. Il n'en résulle pas seulement un gaspillage immense, un
énorme manque à gagner; le système suscite obligaioirement la
réaction, la lutte ce ceux à qui il prétend s'imposer. Longtemps
avant qu'il ne soit question de révolution ou de conscience politi-
que, ceux-ci n'accepient pas, dans la vie quotidienne de l'usine,
d'èire traités en objets. L'organisation capitaliste ne peut pas se
faire seulement en l'absence des intéressés, elle est obligée en
meme temps de se faire à l'encontre des intéressés. Son résultat
n'est pas seulement le gaspillage, c'est le contlit perpétuel.
Si mille individus ont un potentiel donné de capacités d'orga-
nisation, le capitalisme consiste à en prendre à peu près au
hasard une cinquantaine, à leur confier les tâches de direction
et à décider que les autres sont des cailloux. C'est déjà là, méta-
phoriquement parlant, une perte d'énergie sociale à 95 %. Mais
ceci n'est qu'un aspect de la question. Comme les neuf cent cin-
quante restants ne sont pas des cailloux, et que le capitalisme
est simultanément obligé de s'appuyer sur leurs facultés humaines
et de les développer pour pouvoir fonctionnner, ils réagissent à
cette organisation qu'on leur impose, ils luttent contre elle. Leurs
facultés d'organisation, qu'ils ne peuvent exercer pour un système
qui les rejette et qu'ils rejettent, ils les déploient contre ce sys-
tème. Le conflit s'installe ainsi en permanence au coeur de la vie
sociale. Il devient, en même temps, la source d'un nouveau gas-
pillage : car les activités de la petite minorité de dirigeants, ont
(2) La production, l'atelier de l'usine
et le « marché ».
non pas l' « économie >>
dès ce moment pour objet esssentiel non pas tant d'organiser
l'activité des exécutants, mais de riposter à la lutte des exécutants
contre l'organisation qui leur est imposée. La fonction essentielle
de l'appareil de direction cesse d'être l'organisation et devient la